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Suzanne Daumann
Au cours de sa saison merveilleusement variée, l’Opéra de Rennes a invité
les 11 et 12 février Damien Guillon et son Banquet Céleste pour une soirée
baroque des plus ravissantes. L’opéra raconte les amours du berger Acis et la nymphe Galatée. Pour leur
malheur, le cyclope Polyphemus a aussi jeté son dévolu sur Galatée, et dans un
excès de rage et jalousie, écrase Acis sous un rocher. Devant les prières de la
nymphe, les dieux transforment le berger en fleuve, et le rendent ainsi
immortel. La partition de Händel est limpide et profonde, entraînante et variée comme
ce fleuve, et les artistes lui rendent amplement justice, en faisant sortir
chaque nuance comme l’on voit briller les cailloux au fond d’une rivière. Damien Guillon dirige le Banquet Céleste avec une précision mathématique
empreinte de passion et délicatesse. Comme nous avons affaire à une version de concert ce soir, nulle mise en
scène pompeuse et baroque, ou ramené au présent de force, vient troubler notre
concentration sur la musique. Un jeu de scène discret, un narrateur, Olivier
Dutilloy, qui introduit chaque acte en relatant son contenu avec une diction
naturelle et claire, et la diction parfaite des chanteurs, il n’en faut pas
plus pour comprendre la simple intrigue. Katherine Crompton, soprano, est touchante et charmante dans le rôle de
Galathée, et avec sa voix claire et cristalline sait saisir toutes les nuances
de la partition. Le ténor Cyril Auvity lui donne la réplique. Il chante avec
naturel et une aisance innocente au timbré doré qui sied parfaitement à son
personnage champêtre. Edward Grint, barytone à la voix puissante et chaude au
timbre clair, est Polyphemus, avec un air d’innocence, un peu comique, un peu
dépassé. Le ténor Patrice Kilbride est Damon, l’ami et conseiller d’Acis, et la
mezzo-soprano Emilie Nicot prend le rôle de Coridon. Un petit miracle se
produit quand toutes ces voix se mêlent dans le chœur, et la plainte « The
gentle Acis is no more » est sublime. Une soirée charmante donc, une bouffée d’air frais, une dose de simplicité
dans une période compliquée, qu’on quitte en se promettant de relire Ovide,
presto presto.
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