Foto: Laurent Guizard
Suzanne Daumann
Décidément, à l’Opéra de Rennes, on n’a pas peur de s’ouvrir à des œuvres,
des partenaires et des publics inhabituels. Ainsi ce soir, nous pouvons
assister à une interprétation de l’Oresteïa de Xenakis par l’Atelier XXème du
Conservatoire à Rayonnement Régional de Rennes, soutenu par la Maîtrise de
Bretagne et le Chœur Prolatio, Rémi Durupt aux percussions solo, et le baryton
Dyonisios Sourbis, dirigée par Sylvain Blassel. La soirée est filmée par des
étudiants de Rennes 2 et par conséquent, nous nous trouvons parmi un public
jeune et enthousiaste. Il y a de quoi : l’œuvre est fascinante, l’histoire nous vient de la
Grèce antique, elle est chantée en grec ancien. Elle tourne autour du
personnage d’Oreste, qui se trouve pris dans un engrenage de violence et
vengeances. Pour venger son père que sa mère avait tué pour venger la mort de
leur fille, il tue sa mère et son amant, puis se trouve poursuivi par les
Erinyes, mauvais esprits, que nous identifions sans mal comme des
manifestations d’une conscience coupable. C’est l’intervention de la déesse
Athena, et une justice neutre et indépendante, basée sur la démocratie, qui va
les transformer en esprits bienfaisants, les Euménides. Une histoire
intemporelle, donc, la lutte contre la loi du plus fort et la voix de la
raison. Intemporelle est la musique de Xenakis, à la dramaturgie basée sur le
rythme, savante et excitante, avec son Sprechgesang archaïque. Les interprètes lui font amplement justice. Sylvain Blassel dirige
l’Atelier XXème avec beaucoup de finesse, les chœurs, Prolatio et la Maîtrise
de Bretagne sont formidables de justesse et énergie. Il faut admirer Dyonisios
Sourbis, qui passe du falsetto aux graves en une même phrase, ainsi que Rémi
Durupt aux percussions qui lui donne la réplique dans la longue scène de
Cassandre. Un moment musical hors du commun en somme, dont on sort rafraîchi et
surpris.
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